Séquestration du carbone : définition, fonctionnement et enjeux

Rédigé par Grégoire Bénavent
Mis à jour le 24 sept. 2025
Temps de lecture : 8 min
Séquestration du carbone

Sommaire

La séquestration carbone est un processus naturel ayant lieu dans le cadre du cycle du carbone. Plusieurs grands réservoirs, dont l’atmosphère, s’échangent en permanence du carbone sous différentes formes. Dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique, ces flux sont particulièrement scrutés. Certains écosystèmes et solutions artificielles – les puits de carbone – absorbent en effet plus de carbone de l’atmosphère qu’ils n’en rejettent. Cet article revient sur la définition et le fonctionnement de la séquestration carbone, ainsi que sur les enjeux qui lui sont associés.


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Qu’est-ce que la séquestration carbone ?

La séquestration carbone correspond au stockage de carbone sur le long terme dans des réservoirs naturels ou artificiels. Contrairement au carbone présent dans l’atmosphère, le carbone séquestré ne produit pas d’effet de serre et ne participe pas directement au réchauffement climatique. C’est pourquoi la protection et le développement de ce processus constitue un levier important des politiques de transition bas carbone. La majorité du temps, on parle de séquestration carbone pour se référer à l’action des puits de carbone.

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Si le méthane (CH4) est parfois évoqué, la séquestration carbone concerne presque uniquement le dioxyde de carbone (CO2).

Les puits de carbone sont des réservoirs qui absorbent plus de carbone atmosphérique qu’ils n’en rejettent. Il peut s’agir d’écosystèmes naturels, comme les océans, les forêts et les sols, ou de solutions technologiques. Au-delà des puits, certains stocks séquestrent le carbone sans réduire activement la concentration de gaz à effet de serre (GES) dans l’atmosphère.

En effet, il existe des réservoirs passifs qui restent stables sans absorber ni libérer de carbone. On peut penser, par exemple, au bois utilisé dans les constructions. Certains stocks de carbone peuvent également relâcher plus de CO2 dans l’atmosphère qu’ils n’en absorbent, se transformant en source nette d’émission. Les gisements de combustible fossile (charbon, pétrole, gaz naturel) utilisés comme sources d’énergie en sont des exemples.


Quelle est la différence entre la séquestration et le stockage du carbone ?

Si ces termes semblent parfois employés en tant que synonymes, ils ne désignent pas tout à fait la même chose. La séquestration correspond uniquement au stockage du carbone sur une longue durée. En effet, un écosystème peut tout à fait absorber et stocker le carbone pendant une courte période, avant de le relâcher dans l’atmosphère.

C’est par exemple le cas du maïs, qui capte du carbone pendant sa pousse, mais le rejette intégralement après la récolte. On ne peut donc pas estimer que les plants de maïs séquestrent le carbone. Il n’existe pas de durée de stockage minimale universelle pour définir ce qui constitue de la séquestration carbone. Cependant, des périodes de stockage minimales peuvent être imposées, notamment dans le cadre de projets de compensation carbone labellisés.


Comment fonctionne la séquestration carbone ?

Après le captage du carbone dans l’atmosphère, la séquestration peut fonctionner de différentes manières. Dans la plupart des cas, le carbone présent dans le CO2 est absorbé puis stocké sous une autre forme. En effet, le carbone est un atome qui, en se combinant avec d’autres atomes, peut former de nombreuses molécules.

Elles peuvent être gazeuses, comme le dioxyde de carbone, mais aussi organiques ou encore minérales. Selon les écosystèmes ou les solutions technologiques, la méthode de captage du CO2 et les raisons permettant sa séquestration diffèrent. Énumérer tous les processus existants ou théorisés serait cependant très fastidieux et indigeste pour le lecteur. Voici donc une présentation du fonctionnement des principaux puits de carbone et de leur capacité à séquestrer le CO2.

Les processus de séquestration carbone naturelle

La majorité des puits de carbone naturels captent le dioxyde de carbone de l’atmosphère grâce à la photosynthèse. Les plantes des forêts et le phytoplancton des océans créent du glucose à partir du carbone présent dans le CO2 et de l’eau qu’ils captent dans la terre. Le carbone est alors stocké sous forme de matière organique. Une partie est ensuite progressivement transférée au reste de la chaîne alimentaire.

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L’océan dispose d’une autre méthode pour capter le carbone de l’atmosphère : la pompe physique. Le refroidissement des eaux de surface aux hautes latitudes permet de dissoudre le CO2. Le carbone est ensuite emporté en profondeur sous d’autres formes.

Au cours de leur vie, les animaux réémettent une partie de ce carbone dans l’atmosphère (respiration, méthane émis par les ruminants). Lorsqu’un organisme végétal ou animal meurt, une partie du carbone issu de la photosynthèse est de nouveau transférée. Dans l’océan, les débris organiques chutent dans les couches profondes de l’océan. Ils restent alors piégés sous la forme de sédiments pendant au moins des milliers d’années, si ce n’est beaucoup plus.

Sur la terre ferme, la décomposition des matières organiques va faire passer une partie du carbone dans les sols et les sous-sols. En fonction des types de sols, le carbone peut rester piégé plus ou moins longtemps. Les prairies et les sols forestiers constituent des puits de carbone intéressants. En revanche, les sols artificialisés et les terres cultivées constituent des sources nettes d’émissions de GES.

Les technologies de séquestration carbone artificielle

Différentes solutions technologiques ont vu le jour pour compléter la capacité de séquestration carbone des puits naturels. Le captage et stockage géologique du CO2 (CCS) représente la principale option artificielle pour stocker du carbone sur le long terme. Il s’agit d’absorber le carbone directement lorsqu’il est émis, sur certains sites industriels très polluants. Une méthode alternative, le DACCS, consiste à capter le CO2 déjà émis dans l’air avant de l’enfouir. Cette technologie est cependant loin d’être mature à l’heure actuelle.

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D’autres technologies, appelées CCU, visent à réutiliser le carbone capté, au lieu de le séquestrer.

Quelle que soit le mode de captage utilisé, le reste du processus est similaire. Le CO2 est compressé et transporté vers des sites d’enfouissement. Le dioxyde de carbone est alors injecté à plus de 1000 m de profondeur dans différents environnements. Il peut s’agir d’anciens réservoirs d’hydrocarbures épuisés, de veines de charbon ou encore d’aquifères salins.

Si ce type de puits de carbone artificiel présente des intérêts, il est aussi largement critiqué pour plusieurs raisons. Le captage et stockage du CO2 est d’abord très coûteux. De plus, sa mise en œuvre implique des risques environnementaux et sanitaires, et l’idée d’enfouir du carbone est encore loin de faire l’unanimité.


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Qu’est-ce qu’un projet de séquestration carbone ?

Un projet de séquestration carbone vise à restaurer ou à augmenter un puits de carbone naturel, ou à mettre en place un puits de carbone artificiel. La majorité du temps, ce type d’initiative est réalisé dans le cadre du marché de la compensation carbone. Des entreprises financent des projets de séquestration carbone en achetant des crédits carbone.

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Une initiative de compensation carbone ne vise pas à toujours à absorber et à séquestrer du carbone. Ce marché comprend également des projets de réduction ou encore d’évitement des émissions.

Chaque initiative dispose d’un prix à la tonne de CO2 économisée qui est estimé lors d’études. La plupart des projets de séquestration carbone actuels concernent les puits de carbone de la forêt et des sols. Les actions de reforestation ou d’afforestation (plantation dans une zone dépourvue d’arbres) constituent les exemples les plus médiatisés.


Quelle est la place de la séquestration carbone dans la lutte contre le changement climatique ?

La séquestration carbone occupe une place très importante dans la lutte contre le changement climatique. Pourtant, il est très difficile d’influencer directement la capacité d’absorption des puits naturels. Si d’autres approches sont théorisées ou explorées, l’utilisation des terres et le changement d'affectation des terres et foresterie (UTCATF) constitue le premier levier sur lequel il est possible d’agir. C’est pourquoi les capacités de stockage des puits de carbone forestiers et des sols sont directement intégrées dans les objectifs de transition mondiaux, européens et nationaux.

Les objectifs de la séquestration carbone en France

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Si la séquestration carbone artificielle est encore peu développée sur le territoire, la SNBC-2 prévoit un recours progressif au CCS dans les années 2030-2040.

En France et dans l’Union européenne, l’objectif est d’atteindre la neutralité carbone pour 2050. Cela signifie que les capacités d’absorption combinées de l’UTCATF et des puits artificiels doivent être au moins égales aux émissions de GES résiduelles générées par les activités humaines.

Sur le territoire national, la deuxième version de la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC-2) estime que cela représenterait environ 80 Mt CO2eq absorbées puis séquestrées par an. À titre de comparaison, le secteur de l’UTCATF était un puits net de carbone qui a absorbé 37,4 Mt CO2eq pour l’année 2023.

La place de l’UTCATF dans la transition bas carbone mondiale

Au niveau global, l’article 5 de l’Accord de Paris présente l’objectif de conserver et renforcer les puits de carbone, sans donner d’objectif chiffré. La majorité des pays signataires intègrent ainsi le secteur de l’UTCATF dans leurs contributions nationales déterminées (NDC). Ces plans d’action climatique couvrant des périodes de 5 ans comprennent parfois des objectifs chiffrés concernant la séquestration carbone naturelle de ce secteur.

Cependant, comme le rappelle le rapport 2024 des émissions de GES du monde entier publié par le Centre commun de recherche de l’UE, les estimations liées à l’UTCATF présentent des limites. La complexité des écosystèmes, la difficulté pour déterminer ce qui résulte de l’action humaine ou non et le reporting souvent incomplet des pays sont notamment en cause. Malgré ces lacunes, des chiffres des performances de l’UTCATF sont régulièrement publiés et analysés.

Le même rapport estime que ce secteur a retiré environ 1,25 Gt CO2eq de l’atmosphère en 2023, en excluant les émissions des feux de forêt. Cela équivaut à 2,3 % des émissions mondiales de la même année, hors UTCATF. Cependant, en comptant les feux de forêt, le secteur dans son ensemble a exceptionnellement représenté une source nette de carbone, émettant 1.5 Gt CO2eq en 2023.


Quelles sont les limites de la séquestration carbone ?

La plus grande limite de la séquestration carbone est qu’elle repose sur des écosystèmes complexes, eux-mêmes soumis aux conséquences du changement climatique. Or, ces impacts environnementaux dégradent souvent les puits de carbone naturels et leur capacité à absorber du CO2 et à le stocker durablement. En parallèle de cette volatilité, les incertitudes vis-à-vis des puits artificiels sont nombreuses. Dans ce contexte, la prise en compte des performances des puits de carbone dans les stratégies de transition nécessite la plus grande prudence.

Des écosystèmes complexes fragilisés par le changement climatique et l’action humaine

Les incendies de forêt et les épisodes de sécheresse réduisent les puits de carbone des forêts et des sols. L’océan mondial, plus gros réservoir de carbone au monde, est lui aussi impacté. Son acidification en raison de la dissolution de grandes quantités de CO2 ou encore l’augmentation de la température de l’eau en sont des exemples.

Les activités humaines participent également à la fragilisation des puits naturels. L’artificialisation des sols, l'agriculture intensive ou encore la déforestation diminuent de fait le potentiel de séquestration des écosystèmes. Les puits de carbone artificiels, qui pourraient constituer une alternative, représentent au mieux des solutions de long terme. Les coûts sont encore trop importants, les impacts sur l’environnement nombreux et le territoire trop peu aménagé, ce qui mène à un stockage principalement off-shore.

Un manque de fiabilité pour se reposer sur les performances des puits de carbone

L’instabilité des puits de carbone rend très incertaine toute prédiction sur la contribution de la séquestration carbone aux objectifs de décarbonation. Ce problème est d’ailleurs largement illustré par les objectifs français de l’UTCATF, largement revus à la baisse ces dernières années. Estimé à environ -47 Mt CO2eq en moyenne dans les années 2000, le puits forestier national s’est en effet largement affaibli.

Relativement stable depuis 2010, il atteint une moyenne de -38 Mt CO2eq. Certains puits de carbone de la métropole sont même devenus émetteurs, tandis que les sols agricoles émettent également plus qu’ils n’absorbent de CO2. Pour la période 2024-2028, la SNBC-2 prévoyait un budget carbone de -42 Mt CO2eq. Le budget provisoire de la troisième version de la Stratégie nationale bas-carbone ne vise plus que -9 Mt CO2eq. Autrement dit, l’ambition annuelle de l’UTCATF pour cette période a diminué d’environ 78,6 %.


Ce qu’il faut retenir

La séquestration carbone participe à la régulation du climat en réduisant les émissions de GES présentes dans l’atmosphère. Cependant, les performances des puits de carbone sont trop instables pour s’y fier dans le cadre des objectifs nationaux et internationaux de transition bas carbone. Il est donc impératif de se concentrer sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre provenant des activités humaines.

Les organisations peuvent participer à leur niveau, notamment en réalisant un bilan carbone suivi d’un plan de transition. En parallèle des actions de réduction des émissions, il est crucial de continuer à préserver les puits de carbone naturels et à développer progressivement les puits artificiels.


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Cet article a été rédigé par Grégoire Bénavent,

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