Pierre Maillard, interview sur BSmart : rénovation énergétique, quels défis ?

Rédigé par Marianne
Mis à jour le 25 avr. 2023
Temps de lecture : 6 min
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Dans un contexte où la volatilité des prix de l'énergie impacte le secteur et où le cadre réglementaire Européen impose de nouvelles échéances, les objectifs en termes de rénovation énergétique en France deviennent un enjeu primordial.

Pierre Maillard, PDG de Hellio, acteur de référence de la l’efficacité énergétique, a répondu le 6 avril 2023 aux questions de Thomas Hugues pour Smart Impact, magazine de l'économie durable et responsable de BSmart, au sujet de la rénovation énergétique et des défis en cours et à venir !



Thomas Hugues : La rénovation énergétique, secteur en croissance, poussé à la fois par les enjeux de transformation environnementale, mais aussi par le contexte d'inflation sur les prix de l'énergie.

Pierre Maillard : Le secteur de la rénovation énergétique est un secteur en croissance et très lié au réglementaire, aux dispositifs d'accompagnement financier, aux dispositifs d'aide, à l'évolution des prix de l'énergie. Quand le prix s'envole, la seule chose à faire pour maîtriser ses dépenses et ses coûts est de maîtriser sa consommation énergétique : de choisir entre efficacité énergétique et sobriété énergétique, deux sujets différents, à bien distinguer. Mais le marché, lui, a toutes les cartes en main pour croître pendant plusieurs années, plusieurs décennies. Ce sont des politiques gouvernementales à bien axer pour s'assurer une stabilité de croissance et ne pas rester sur un marché qui peut être opportuniste.


Thomas Hugues : Hellio intervient dans différents secteurs : collectivités, copropriétés, industries, propriétaires des logements collectifs et individuels, ces derniers se réveillent et se disent « il faut qu'on fasse quelque chose ». 

Pierre Maillard : C'est vrai, il y a beaucoup de choses. Il y a les incitations, il y a la réglementation, c'est à dire la sanction si vous ne faites pas ce que vous demande le Gouvernement. Je pense au décret tertiaire : 40 % d'économies d'énergie à réaliser avant 2030, pour l'ensemble du secteur tertiaire. Je pense aux grandes surfaces alimentaires possédant un parking de plus de 1 500 mètres carrés sur lequel il va falloir couvrir 50 % de la surface en ombrières photovoltaïques ou en espaces végétalisés, etc. Il y a beaucoup d'enjeux à la fois réglementaires et à la fois d'efficacité énergétique, donc de maîtrise de la consommation énergétique.


Thomas Hugues : Quelques chiffres pour présenter Hellio : 150 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2022, près de 300 collaborateurs aujourd'hui, mais aussi cet équilibre : un peu plus de 50 % de femmes. C'est quoi le premier business de Hellio ? Les collectivités, le tertiaire, les immeubles en copropriété ?

Pierre Maillard : A l’origine, nous sommes un bureau d'études orienté pour les industriels, les collectivités et le secteur tertiaire. Notre métier est d’analyser une ligne de production, un bâtiment, sa consommation et trouver des solutions qui vont permettre de réduire sa consommation énergétique, tout en gardant la productivité. Notre objectif est de trouver des solutions techniques mais aussi financières pour motiver le donneur d'ordre à lancer des travaux d'efficacité énergétique.

L'objectif va être de maîtriser la consommation énergétique, à savoir les factures et donc le pouvoir d'achat ; mais aussi d'améliorer le confort ou la productivité (confort dans le résidentiel, productivité dans l'industrie), et de valoriser le patrimoine. Quand vous avez rénové une maison ou une ligne industrielle, vous avez amélioré votre patrimoine ce qui engendra plus de valeur. Notre mantra : le triptyque valorisation du patrimoine, maîtrise du pouvoir d'achat et réduction de la consommation d'énergie.


Thomas Hugues : Donc bureau d'études et ensuite, les travaux sont faits par d'autres ? Pour bien comprendre ce que sont les métiers de Hellio.

Pierre Maillard : Oui, absolument. Nous préconisons des solutions, analysons le projet dans son ensemble, devisons et trouvons les bons partenaires selon les secteurs d'activité. 
Les analyses peuvent être très spécifiques : récupération de chaleur sur des systèmes frigorifiques, dans les datacenters... c’est l'enjeu du numérique vert ! Notre champ d’actions est également sur l'isolation d'un bâti, sur la production photovoltaïque. 
Sur l'ensemble des devis, Hellio va travailler sur l'ingénierie financière afin de trouver le maximum d'aides et subventions qui vont permettre de réduire le reste à charge du donneur d'ordre. Nous allons l'accompagner sur la durée du chantier de A à Z. Puis, post chantier pour suivre les économies d'énergie. Nous militons énormément chez Hellio pour les économies d'énergie réelles ! Nous voulons nous engager, prendre notre responsabilité et promettre de réaliser une réduction des coûts de consommation d'énergie. Pour instaurer ce suivi, nous mettons en place des indicateurs de performance énergétique et engageons notre responsabilité avec un contrat de performance énergétique sur 5 ans, 10 ans, 15 ans, pour nous assurer et pour vous assurer que vous allez réaliser des économies d'énergie et donc des économies sur les factures.


Thomas Hugues : Il y a évidemment l'activité autour de l'habitat collectif. L’enjeu majeur pour les copropriétés, c'est de se mettre en conformité pour pouvoir continuer à louer. Il y a la loi Climat et résilience qui va mettre une pression. 700 000 passoires thermiques vont sortir du marché en 2025. Ça commence par quoi ? Ça commence par un audit ? Quelle est la démarche ?

Pierre Maillard : La première chose, est de savoir de quoi on parle. Il ne faut pas confondre le DPE, Diagnostic de performance énergétique et l'audit énergétique. Le DPE va vous donner une note sur un bâti. L'audit énergétique va lui, travailler l'ensemble du bâti et de son exploitation pour préconiser des solutions pour atteindre une classe énergétique. Selon les objetifs d’atteinte, 35, 40 ou 45, 55 %, Hellio va y associer des budgets avec un accompagnement financier couplant les aides. Nous portons le financement pour limiter le reste à charge et surtout inciter aux travaux d'économies d'énergie.


Thomas Hugues : Parce que le risque, c'est qu'ils ne soient pas faits et qu'il y ait des millions d'appartements qui sortent du marché ?

Pierre Maillard : Absolument. L'enjeu est colossal. Il y a entre 5 et 7 millions de passoires énergétiques en France. Il y a un enjeu qui est vraiment colossal et le gouvernement s'est engagé à faire 350 000 rénovations performantes par an, puis 700 000 à partir de 2030. Aujourd'hui, on est à 1 % des objectifs. La France est très loin des objectifs, la seule façon de les atteindre est d'avoir une stabilité sur les dispositifs d'accompagnement financiers : les aides aux économies d'énergie tels que les Certificats d'Économies d'Énergie (CEE) et MaPrimeRénov’, sur lesquels il faut dissocier les sujets.
 
En France, nous avons trop souvent voulu mélanger les sujets : faire de l'accompagnement social et de l'accompagnement à l'efficacité énergétique. Or, ce sont deux sujets distincts. L'accompagnement social peut intervenir en cumulatif dans l'accompagnement à l'efficacité énergétique. Mais si on veut accélérer la transition énergétique en France et massifier la rénovation énergétique, il faut dissocier les choses. Ça n'empêche pas de les cumuler. Mais il faut les dissocier. Il faut bien travailler d'abord sur l'efficacité énergétique, la rénovation énergétique en France, avec des objectifs clairs et un axe qu'on puisse suivre. Et puis après, il y a le sujet de la précarité énergétique : sortir les ménages qui sont en situation dans cette situation et les accompagner financièrement, de façon un peu supplémentaire par rapport à d'autres qui peuvent être davantage privilégiés, pour les aider à lancer les travaux de rénovation énergétique.


Thomas Hugues : Concernant vos clients B2B, « plus de 5 000 dossiers d'efficacité énergétique pris en charge l'an dernier ». Il y a par exemple les Caisses Nationales de Sécurité Sociale, mais c'est vaste. Elles vous ont confié quelles missions ?

Pierre Maillard : Oui, on a différents partenariats. Concernant le secteur tertiaire avec l’UCANSS, l'ensemble des caisses nationales, le partenariat consiste à les accompagner sur leurs projets de travaux de rénovation énergétique : analyse, préconisation technique et financière. On ne peut pas aller chercher un maximum d’aides sans avoir vérifié et travaillé techniquement le projet. 


Thomas Hugues : Vous œuvrez aussi dans la lutte contre le mal logement. Vous êtes membre historique du collectif Stop Exclusion Énergétique. En quoi consiste cet engagement ?

Pierre Maillard : C'est un des enjeux prioritaires en France, il y a 7 millions de passoires énergétiques. Il faut qu'on s'y mette ! Pour y arriver, il faut atteindre une stabilité des dispositifs d'aide financière.
 
Nous avons vécu en 2021 et 2022, une crise dans la rénovation énergétique parce que certains gros dispositifs d'accompagnement financier étaient en chute libre. Et donc il a fallu une action de la part de la DGEC pour intervenir et redonner des obligations, des volumes d'efficacité énergétique à atteindre de la part des gros obligés. Or, on est en train de vivre un peu la même chose que ce qu'on a vécu il y a 18 mois et 24 mois. En 2023, il faut agir pour pouvoir garder une stabilité du secteur et ne pas revivre une crise. Cette crise va toucher tous les secteurs : métiers de l'artisanat, fabricants, industriels, etc. Nous risquons de revivre ce qui s'est passé il y a 18 mois si nous n'agissons pas maintenant. L’objectif est de donner plus de visibilité sur 4, 5, 10 ans


Thomas Hugues : Vous dites qu'il vaut mieux flécher les aides publiques. Pourquoi ? 

Pierre Maillard : Aujourd'hui, en France, 75 % des aides à la rénovation énergétique sont à destination du secteur résidentiel. Or, le secteur résidentiel ne représente que 28 % de la consommation d'énergie finale en France. Hellio milite pour qu'il y ait un fléchage des aides. Par exemple, le secteur industriel qui consomme tant devrait pouvoir toucher une enveloppe, un pourcentage équivalent à sa consommation d'énergie finale en France. Aujourd'hui, les trois quarts des aides vont dans le secteur du logement sur lequel il est compliqué de suivre les économies d'énergie réelles.


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